- Question 1 : comment réduire les délais de diagnostic ?
- Question 2 : comment évaluer l’urgence et organiser la prise en charge ?
- Question 3 : modalités du traitement et de la surveillance d’une forme non compliquée
- Question 4 : quelles sont les modalités du traitement et de la surveillance d’une forme grave ?
- Question 5 : comment bien choisir une chimioprophylaxie ?
Plus de 4 000 cas de paludisme d’importation à Plasmodium falciparum sont dénombrés chaque année en France métropolitaine. Vingt malades en meurent tous les ans. Au moins deux tiers des malades atteints de paludisme sont hospitalisés pendant une durée moyenne de quatre jours.
Ces chiffres illustrent les limites d’un système de santé qui n’empêche pas toujours une maladie évitable, qui ne guérit pas toujours une maladie curable et qui génère des coûts à son détriment.
Comment améliorer cette situation ?
– En portant plus tôt le diagnostic. En effet, à l’échelon de la collectivité médicale, le paludisme est une maladie rare et donc potentiellement moins bien connue que d’autres : un médecin peut y être confronté tous les trois ans ; deux tiers des laboratoires de biologie n’en voient aucun dans l’année. Une information régulière et répétitive est donc nécessaire d’autant que plus de 2 millions de voyageurs au moins sont exposés au risque tous les ans, ce chiffre étant en constante augmentation.
– En prônant largement les mesures de prévention individuelle efficaces contre les moustiques malgré les contraintes qui les font souvent négliger par les voyageurs.
– En diffusant largement des messages de chimioprophylaxie à la fois clairs, cohérents et adaptés aux préoccupations individuelles de chaque demandeur.
Question 1 : comment réduire les délais de diagnostic ?
D’après les données du Centre National de Référence pour les Maladies d’Importation, le délai médian entre l’apparition des symptômes et l’établissement du diagnostic du paludisme d’importation à P. fialciparum est de trois jours ; or, le paludisme est une urgence diagnostique et thérapeutique compte tenu du risque imprévisible d’évolution rapide vers une forme grave. Les retards au diagnostic peuvent être dus à la négligence des patients ou de leur entourage et/ou à des errances diagnostiques devant des formes trompeuses. Les moyens proposés pour raccourcir ces délais concernent à la fois les voyageurs et les professionnels de santé.
L’information du voyageur comprend deux volets :
– l’implication de nombreuses sources d’information (médias, voyagistes, pharmaciens d’officine, comités d’éducation pour la santé...) pour sensibiliser le voyageur au risque de paludisme ;
– les consultations préalables au voyage auprès d’un médecin (généraliste, médecin du travail, spécialiste, centre de référence ... ) qui, en plus des conseils de prévention, doit informer sur les signes d’alerte à ne pas négliger pendant le séjour et dans les mois qui suivent le retour.
La formation des professionnels de santé (cliniciens et biologistes)
La connaissance des éléments épidémiologiques et cliniques évocateurs du diagnostic doit être un élément important de la formation initiale et continue des médecins libéraux et hospitaliers. Le prérequis pour évoquer le diagnostic est d’avoir la notion de voyage en pays d’endémie. Le paludisme d’importation concerne, dans plus de 90 % des cas, des sujets ayant séj . ourné en Afrique intertropicale, pour des raisons de tourisme, de travail ou de visite dans le pays d’origine. Le pic de fréquence se situe entre juillet et octobre.
Plus de 90 % des paludismes d’importation sont des formes simples. Toute fièvre au retour d’un séjour en zone d’endémie doit faire évoquer le diagnostic, en sachant que les formes trompeuses sont fréquentes, notamment chez l’enfant : inconstance de la fièvre, troubles digestifs, urgence pseudochirurgicale abdominale, syndrome grippal.
Les signes neurologiques quels qu’ils soient, associés à de la fièvre et/ou à des troubles digestifs, sont évocateurs de formes graves.
Le diagnostic biologique du paludisme est une urgence
Les résultats doivent être rendus dans un délai maximum de deux heures en prenant contact avec le clinicien.
Le diagnostic repose sur la mise en évidence du parasite dans le sang par un examen qui peut être réalisé par tout laboratoire. Le prélèvement doit être fait immédiatement, sans attendre un frisson ou un pic thermique.
Le frottis san-uin est la technique la plus utilisée en laboratoire polyvalent ; c’est une technique rapide qui permet une bonne identification de l’espèce et le calcul de la parasitémie. Il peut être mis en défaut dans les formes pauci parasitaires.
La goutte épaisse, plus sensible, est l’examen de référence mais sa lecture est plus délicate.
Bien qu’il s’agisse d’un diagnostic rare, les contrôles de qualité permanents garantissent une bonne fiabilité du résultat. Si le diagnostic positif est facile, l’affirmation de l’absence de parasitisme ne peut se faire qu’après lecture prolongée des lames par plusieurs intervenants.
Afin d’augmenter la sensibilité du diagnostic dans les cas difficiles, il faut insister sur la prise en compte du contexte clinico-épidémiologique (rôle du dialogue clinicien biologiste) qui incite à la répétition des examens et au recours éventuel à un laboratoire spécialisé. En effet, les autres techniques (QBC malaria, détection d’antigènes solubles spécifiques de Pfialciparum) ne sont pratiquement pas utilisées dans les laboratoires polyvalents du fait de leur coût et de leur non remboursement par la Sécurité Sociale. Par contre dans les services spécialisés, elles peuvent être soit un apport au diagnostic immédiat de P. falciparum, soit une aide à un diagnostic rétrospectif.
Une thrombopénie inférieure à 150 G/L est fréquente et a une bonne valeur d’orientation dans un contexte clinique et épidémiologique.
Le jury propose la technique du frottis sanguin en première intention pour le diagnostic biologique du paludisme.
Question 2 : comment évaluer l’urgence et organiser la prise en charge ?
Quelle est la pertinence des critères de gravité dérinis par l’OMS ?
Le paludisme grave est défini par l’OMS à l’aide de 10 critères coma, anémie profonde (hémoglobine < 5 g/dl), insuffisance rénale, syndrome de détresse respiratoire aigüe, hypoglycémie, choc, saignement et/ou coagulation intravasculaire disséminée, convulsions généralisées ou répétées, acidose métabolique, hémoglobinurie macroscopique. Ces critères, élaborés en zone d’endémie, n’ont pas été validés sur une population non immune. Parmi les critères proposés, les plus pertinents par leur fréquence et leur valeur pronostique sont le coma, l’état de choc, l’acidose et l’oedème pulmonaire. Le taux de parasitémie (> 5 %) pris isolément n’est pas un facteur de gravité.
Chez l’enfant, les formes graves sont très rares en France. La fréquence et la signification pronostique des critères de gravité de l’OMS n’ont pas été évaluées. Les signes de gravité les plus importants sont neurologiques (convulsions fébriles, troubles de conscience avec risque de décès dans un délai de moins de 24 heures et possibilité de séquelles). Toute convulsion fébrile chez J’enfant au retour d’une zone d’endémie doit faire évoquer une forme grave de paludisme. La constatation d’un signe de gravité clinique ou biologique doit conduire à transférer l’enfant en service de réanimation. Dans le cas contraire, le traitement est possible dans un service de pédiatrie générale. Les vomissements, lorsqu’ils sont isolés, ne constituent pas un signe de gravité démontré, mais leur présence nécessite un traitement parentéral.
Quelles sont les limites de la prise en charge ambulatoire ? Toute suspicion de paludisme est une urgence, quelle que soit l’orientation initiale du malade.
Les formes sans gravité immédiate du paludisme d’importation représentent plus de 90 % des paludismes à P..fàlciparum observés en France. Ceci autorise la proposition d’une prise en charge ambulatoire intégrale par le médecin généraliste, sous certaines conditions :
– résultat du diagnostic parasitologique connu le jour même de l’examen ;
– forme simple, sans signe de gravité , - absence de troubles digestifs ;
– taux de parasitémie inférieur à 5 %
– absence de facteurs socioculturels compromettant la bonne observance du traitement ;
– absence de facteur de risque : grand âge, splénectomie, grossesse, pathologie sous-jacente notamment cardiologique, personnes vivant seules ;
– proximité d’un établissement hospitalier
– médicaments disponibles en pharmacie et accessibles au patient pour une prise immédiate ;
– consultations trois et sept jours après le début du traitement pour contrôler l’évolution.
Chez le jeune enfant, la rapidité d’évolution des symptômes et la fréquence des troubles digestifs ne permettent pas de proposer une prise en charge ambulatoire intégrale.
Vers quels services orienter le patient ?
En dehors de la prise en charge ambulatoire intégrale, les malades sont adressés soit au service des urgences soit dans un service référent (après contact téléphonique direct avec un médecin senior du service).
Aux urgences, la prise en charge ne doit jamais être retardée par le délai d’attente. Un protocole écrit de prise en charge du paludisme, identifié et actualisé, doit être facilement accessible. Le diagnostic de paludisme doit conduire immédiatement au traitement curatif. La constatation de signes de gravité impose l’orientation en réanimation.
Les formes non compliquées relèvent d’une surveillance dans une unité d’hospitalisation. Une hospitalisation d’une durée minimum de 24 heures est recommandée afin de s’assurer de l’observance et de l’absence d’intolérance au traitement. Lors de la sortie, le médecin généraliste doit être averti de la nécessité de surveiller l’évolution par une consultation au 7’ jour.
Peut-on traiter un paludisme sans confirmation parasitologique ?
Le jury considère qu’un traitement doit être entrepris, y compris en l’absence de signes de gravité, si la suspicion clinique est suffisamment forte, et même si un premier frottis est interprété comme négatif ou si le résultat n’est pas disponible.
La relecture des lames et un nouveau frottis sont alors nécessaires éventuellement associés à la mise en route d’une technique biologique plus sensible.
Question 3 : modalités du traitement et de la surveillance d’une forme non compliquée
Définition et objectif de la prise en charge
Une forme non compliquée de paludisme à P falciparum est un épisode aigü de paludisme se caractérisant par l’absence de signes de gravité. Dans cette forme, le patient doit toujours guérir.
Le choix d’un antipaludique dépend des médicaments, disponibles, de leur efficacité vis-à-vis de la souche plasmodiale, de leur rapidité d’action, de leur toxicité, du terrain et de l’acceptation du traitement.
En pratique, seuls trois produits, la quinine, la méfloquine et l’halofantrine, sont d’utilisation courante.
Le choix va s’appuyer sur le rapport bénéfice /risque de chacun de ces trois produits.
Remarques et recommandations sur l’usage des antimalariques disponibles
Leur efficacité doit être considérée comme actuellement quasi constante. Elle est comparable entre les molécules. Les résistances restent rares et géographiquement limitées.
Le choix se détermine en fonction des effets secondaires. Aucun des traitements disponibles n’est anodin. Tous ont des risques d’effets secondaires potentiellement graves, soit par le fait d’une toxicité intrinsèque soit par le fait d’un mauvais usage.
L’halofantrine fait peser un risque de complication cardiaque mortelle, Le jury déplore l’absence de données pertinentes de pharmacovigilance pour l’halofantrine.
Les complications liées à la méfloquine sont essentiellement neuropsychiatriques et peuvent être sévères. Leur fréquence est assez élevée (1/200 à 1/1700 traitements curatifs).
La quinine ne comporte de risque de complications mortelles que du fait d’erreurs d’administration lors d’un usage intraveineux. La quinine par voie orale est habituellement bien tolérée. Des difficultés d’observance par voie orale peuvent faire courir un risque d’échec thérapeutique. Le respect strict des posologies, des modalités d’administration et des contre-indications garantit la sécurité de son utilisation.
L’analyse bénérice/risque conduit le jury à recommander chez l’adulte :
– de privilégier la quinine ou la méfloquine dans le traitement de première intention -, le choix est subordonné aux garanties d’observance, aux contre-indications respectives et au contexte socio-économique ;
– de n’utiliser l’halofantrine qu’avec la plus extrême prudence. L’association atovaquone-proguanil est une alternative aux traitements actuels ; sa place reste à préciser.
Les emplois simultanés ou successifs des antipaludiques nécessitent des précautions.
Schémas de traitement
– Quinine :
- per os 8 mg/kg de quinine trois fois par jour pendant sept jours
- par voie intraveineuse 8 mg/kg de quinine diluée dans du sérum glucosé 5 % et administrée en perfusion lente de quatre heures répétée trois fois par jour, ou en perfusion continue sur 24 heures.
Un relais pet os est possible par quinine ou méfloquine.
– Méfloquine :
- 25 mg/kg répartis en deux ou trois prises avec six à 12 heures d’intervalle entre chaque prise.
– Halofaintrine :
- 24 mg/kg en trois prises espacées de six heures, à prendre à distance des repas ;
- une deuxième cure au 7e jour est nécessaire pour réduire les rechutes ; le risque de toxicité cardiaque est alors accru.
– Cas particuliers
- Femme enceinte : la quinine est la seule molécule utilisable.
- Paludisme contracté en zone de polychi miorési stance (zones particulières d’Asie du Sud-Est et d’Amazonie).
- Quinine : intraveineuse ou per os pendant sept jours, associée à la doxycycline 100 mg toutes les 12 heures (indication hors AMM) pendant sept jours ou à la clindamycine 10 mg/kg toutes les huit heures (indication hors AMM) pendant sept jours ;
- arthéméter : disponible en autorisation temporaire d’utilisation à titre nominatif (ATU).
Faut-il poursuivre une chimioprophylaxie après traitement ?
Le risque de reviviscence à partir de formes érythrocytaires est écarté par le traitement curatif schizonticide, à condition qu’il ait été complet. Il n’est pas justifié de proposer un relais à objectif prophylactique.
Suivi et surveillance du traitement
Une surveillance clinique aux 3e et 7e jours après le début de traitement est recommandée.
Prise en charge chez l’enfant
Trois médicaments sont utilisables :
– l’halofantrine 24 mg/kg en trois prises espacées de six heures ;
– la méfloquine 25 mg/kg en deux à trois prises espacées de six à 12 heures
– la quinine : 8 mg/kg trois fois par jour pendant sept jours.
Actuellement, les rapports bénéfice-risque des différents médicaments ne sont pas comparables chez l’enfant et chez l’adulte.
L’halofantrine est le médicament le plus souvent utilisé en France, en pédiatrie, du fait de sa présentation galénique adaptée et de sa bonne acceptabilité. Le respect des contreindications et la surveillance de l’électrocardiogramme limitent probablement le risque de complication cardiaque. Le jury ne souhaite pas modifier cette attitude thérapeutique, sous réserve de données ultérieures émanant des centres de pharmacovigi lance.
La méfloquine et la quinine sont deux médicaments efficaces à condition de surveiller la prise des médicaments et l’absence de troubles digestifs. Une évaluation sur une grande échelle de l’utilisation de la méfloquine reste à faire. Le jury souhaite la mise à disposition de formes galéniques de quinine orale et parentérale adaptées à ces âges.
Question 4 : quelles sont les modalités du traitement et de la surveillance d’une forme grave ?
La prise en charge d’un paludisme grave chez l’adulte et chez l’enfant est une urgence. Tout paludisme grave doit être hospitalisé en réanimation.
En pratique, le terme de forme grave de paludisme remplace les termes d’accès pernicieux, de neuropaludisme, de paludisme cérébral et de forme compliquée.
Le traitement par quinine intraveineuse est instauré dès que le diagnostic est suspecté.
Le clinicien doit faire appel au réanimateur en présence d’un quelconque des éléments suivants : trouble de la conscience et/ou du comportement, baisse de la tension artérielle, anomalie respiratoire, élévation des lactates, acidose métabolique, insuffisance rénale.
Traitement d’une forme grave
Chaque centre hospitalier doit disposer de quinine injectable. Afin d’éviter toute erreur d’administration, une seule présentation commerciale doit être disponible avec la concentration totale en quinine base (ou alcaloïdes base) inscrite sur l’ampoule. La dose de quinine à administrer est exprimée en quinine base quand la spécialité pharmaceutique contient un sel de quinine (Quinoformee) ou en alcaloïdes base quand la quinine est associée à d’autres principes actifs (QuinimaxO), Deux spécialités sont actuellement disponibles :
– Quinimax 125 mg d’alcaloïdes base par mL, ampoules de 1, 2 et 4 mL ;
– Quinoforme 219 mg de quinine base par mL, ampoules de 2 mL.
Le schéma d’administration est le suivant : dose de charge de 17 mg/kg de quinine en quatre heures, suivie d’un traitement d’entretien de 8 mg/kg toutes les huit heures soit en continu (seringue électrique), soit en perfusion de quatre heures.
L’objectif est d’atteindre au plus tôt et de maintenir une quininémie entre 10 et 15 mg/L.
Le relais par quinine orale est fait dès que possible. La durée totale du traitement est de sept jours. Il n’est pas justifié de proposer de relais à objectif prophylactique.
En cas de suspicion de souches de sensibilité diminuée à la quinine (zones particulières de l’Asie du Sud-Est et Amazonie) ime association à la doxycycline (100 mg en intraveineuse toutes les 12 heures ; indication hors AMM) ou, en cas de contre-indication aux cyclines, à la clindamycine (10 mg/kg en intraveineuse toutes les huit heures ; indication hors AMM) est recommandée. L’artéméther est exceptionnellement indiqué en cas de résistance vraie ou de contre-indication formelle à la quinine.
La suspicion d’une infection bactérienne à l’admission justifie une antibiothérapie empirique.
Surveillance clinique et biologique
L’index thérapeutique étant étroit, la mesure de la quininémie permet d’optimiser la posologie. Un dosage en fin de dose de charge peut être proposé pour attester la validité de la posologie initiale. Pour les patients à risque (insuffisance hépatique et/ou rénale, enfant et femme enceinte ... ), des mesures ultérieures de la quininémie peuvent être indiquées.
Une mesure de la parasitémie n’est faite qu’à partir du 3e jour. Si l’état du patient ne s’améliore pas, la parasitémie du 31 jour et une mesure de la quininémie aident alors à l’interprétation d’un échec et permettent de guider une éventuelle modification de posologie.
Le risque d’hypoglycémie, majoré chez l’enfant et la femme enceinte, nécessite un apport adapté de glucose par voie intraveineuse et un contrôle des glycémies toutes les quatre heures. Des tracés électrocardiographiques doivent être régulièrement pratiqués.
Traitements adjuvants
Les corticoïdes sont contre-indiqués. L’exsanguinotransfusion, les anticonvulsivants en préventif et l’héparine n’ont pas d’intérêt. Les indications du remplissage vasculaire, d’épuration extrarénale et d’anticonvulsivants en curatif sont celles qui sont habituellement retenues en réanimation.
Question 5 : comment bien choisir une chimioprophylaxie ?
La plupart des cas de paludisme observés en France surviennent chez des patients n’ayant adopté aucune mesure préventive contre les piqûres de moustiques et/ou n’ayant pas reçu de chimioprophylaxie adaptée.
Les mesures de protection contre les moustiques sont celles qui présentent le meilleur rapport bénéfice/risque. Effectives dès la tombée de la nuit, particulièrement utiles pour les jeunes enfants, elles reposent sur le port de vêtements amples et couvrants, l’utilisation correcte de répulsifs et d’insecticides efficaces (prudence chez l’enfant et la femme enceinte), la mise en place, chaque fois que possible, d’une moustiquaire imprégnée.
Comment améliorer l’accès à la chimioprophylaxie et son observance ?
La chimioprophylaxie est le complément des mesures de protection contre les moustiques.
Les médecins généralistes et les pédiatres doivent être les principaux acteurs de la prévention du paludisme. Les conseils adaptés et personnalisés sont prodigués dans le cadre d’une consultation médicale.
Les centres de conseils aux voyageurs sont des structures de référence. Les conseils téléphoniques ne devraient être donnés qu’aux médecins. Le pharmacien participe à l’information. Le rôle des voyagistes se limite à une sensibilisation du voyageur.
La formation et l’information des praticiens doivent être améliorées. La création d’une banque de données nationale, uniformisée, consensuelle et aisément accessible doit être une priorité pour les autorités sanitaires et l’ensemble des experts. Ces données doivent être mises gratuitement à la disposition des praticiens.
Les informations indispensables à recueillir pour la prescription d’une chimioprophylaxie doivent être exhaustives. Certaines concernent le voyageur : leur objectif est d’évaluer les contreindications, les risques de survenue d’interactions médicamenteuses et d’apprécier les possibilités socioéconomiques d’accès aux soins. D’autres concernent le voyage (zones traversées ou visitées, altitude, saison, durée et conditions matérielles du séjour) : leur objectif est d’évaluer le risque réel d’exposition.
Tableau 1. Prophylaxie chez l’adulte.
Pays du groupe 1 |
chloroquine 100 mg/j tous les jours |
Pays du groupe 2 |
chloroquine (100 mg/j) + proguanil (200 mg/j) utilisés séparément ou en association (Savarine) |
Pays du groupe 3 |
méfloquine 250 mg, une fois/semaine |
Zones de résistance (zones particulières d'Asie du Sud-Est et d'Amazonie) et/ou contre-indication ou intolérance à la méfloquine |
doxycycline 100 mg/j (sel monohydraté), hors AMM |
Tableau II. Prophylaxie chez l’enfant.
|
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chloroquine |
sirop 25 mg/5 mL |
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attention aux intoxications accidentelles |
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comprimés sécables 100 mg |
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proguanil |
comprimés 100 mg |
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méfloquine |
comprimés 50 mg |
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contre-indication: en dessous de 15 kg (en prophylaxie) et en cas d'antécédents de convulsions |
La chimioprophylaxie est-elle toujours nécessaire ?
Une liste des pays pour lesquels une chimioprophylaxie n’est jamais utile (groupe 0 = pas de paludisme à Rfialciparum) est établie chaque année par le Conseil supérieur d’Hygiène Publique de France. Un recensement des grandes villes et régions pour lesquelles le risque d’exposition est également nul bien qu’elles ne fassent pas partie de pays du groupe 0, doit être disponible. Pour toutes les autres destinations, le jury considère que :
– pour une durée de séjour inférieure à sept jours, une chimioprophylaxie est toujours nécessaire dans les zones où le risque de transmission est élevé ; dans les zones où le risque de transmission est faible, l’intérêt de la chimioprophylaxie peut être discuté selon les conditions de séjour et les possibilités d’accès aux soins lors du retour ;
– pour une durée de séjour supérieure ou égale à sept jours, une chimioprophylaxie est toujours nécessaire.
Quels sont les produits et les posologies recommandés ?
La chimioprophylaxie doit être commencée la veille du départ en ce qui concerne la chloroquine, le proguanil et la doxycycline. Pour la méfloquine, deux doses sont données, l’une 10 jours et l’autre trois jours avant le départ (doses test).
– Adultes sains (tableau I)
– Cas particuliers
- Femmes enceintes : une femme enceinte ne doit se rendre en zone impaludée qu’en cas d’absolue nécessité. Seuls la chloroquine et le proguanil sont autorisés.
- Enfant (tableau Il) : il ne faut emmener des nourrissons ou des jeunes enfants dans une zone impaludée qu’en cas d’absolue nécessité.
- Populations migrantes : Ces sujets, lorsqu’ils se rendent dans leurs pays d’origine, doivent bénéficier de la même chimioprophylaxie que les autres sujets non-immuns.
Quelle est la durée de la chimioprophylaxie ?
Pour les séjours de durée inférieure à trois mois, la chimioprophylaxie doit être maintenue en zone d’endémie et doit couvrir quatre semaines après le retour. Pour les séjours prolongés (durée supérieure à trois mois), ou chez les expatriés la chimioprophylaxie doit être maintenue aussi longtemps que possible. On recommandera aux voyageurs de prendre contact rapidement avec un médecin sur place pour évaluer la pertinence et le rapport bénéfice/risque de la chimioprophylaxie.
Le jury ne retient pas d’argument pour limiter l’utilisation prophylactique de la méfloquine à trois mois.
Chez les sujets ayant reçu un traitement curatif après leur retour par quinine (sept jours), méfloquine ou halofantrine, aucune chimioprophylaxie complémentaire n’est nécessaire en l’absence de nouvelle exposition.
Place du traitement de réserve
Le traitement de réserve doit être limité aux voyageurs en situation d’isolement les mettant à plus de 12 heures d’une structure de soins.
Même en cas d’autotraitement, le voyageur doit être informé de la nécessité d’un avis médical rapide.
Le jury considère que les seules molécules utilisables sont par ordre de préférence la quinine orale, la méfloquine et l’association pyriméthamine-sulfadoxine. La doxycycline associée à la quinine est conseillée quand il existe un risque de polychimiorésistance.
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