1. Messages importants
– L’origine allergique (histamine) des angioedèmes est largement prédominante au SAU
– Les termes oedème angioneurotique (AEN) ou angio-œdème héréditaire ou angio-œdème bradykinique sont des synonymes utilisés pour désigner des angio-oedèmes non allergiques, non histaminiques
– Devant un oedeme de Quincke il faut penser à un AEN :
- s’il n’existe ni urticaire, ni conjonctivite, ni bronchospasme associés à l’examen ou dans les atcdts
- si les ttt de l’anaphylaxie (antihistaminiques, corticothérapie et adrénaline) sont inefficaces
- si l’on retrouve dans les atcdts des épisodes récurrents d’angioedèmes cutanés (membre, fesses, organes génitaux, …) ou d’oedeme de Quincke ou de douleurs digestives de cause indéterminée
- s’il existe des atcdts familiaux d’AEN
- même en l’absence d’atcdts familiaux d’AEN car il existe des formes sporadiques et des débuts tardifs révélés par la prise de médicaments IEC/sartan, pillule ou lors d’une grossesse
– En cas de détresse respiratoire, l’intubation oro-tracheale est considérée impossible et l’éventualité du recours à une trachéotomie doit être envisagée
– Les autres formes graves de l’AEN sont les crises douloureuses abdominales responsables d’un syndrome pseudo occlusif voire plus rarement d’un choc hypovolémique
- l’oedeme laryngé survient rarement par rapport aux crises abdominales (ratio 1/50)
– Le traitement en urgence comprend l’administration de ttt spécifiques que les urgentistes doivent connaitre (pronostic vitale engagé dans les formes touchant le visage)
2. TRI
– Niveau 1 ou 2 en cas d’oedeme de la face ou de douleurs abdominale (EVA>5) en fonction des autres constantes
3. Diagnostic
Les AE sont héréditaires (maladie génétique rare) ou acquis (IEC +++)
Formes héréditaires
- résultent d’une synthèse accrue de bradykinine médiateur principal de l’augmentation de la perméabilité capillaire et donc des oedèmes
- on distingue parmi les formes héréditaires 3 types
- type I
- 85 % des formes héréditaires
- diminution du C1 Inh et de son activité fonctionnelle
- type II
- 15-20% des formes héréditaires
- diminution de l’activité fonctionnelle du C1 Inh
- type III
- valeurs nles de C1 inhibiteur avec parfois baisse de l’activité fonctionnelle sous oestrogènes ou lors de la grossesse
- type I
Formes acquises :
- médicamenteuses :
- AE secondaires aux IEC ou aux sartans (10% de réaction croisée)
- survient dans 50% des cas durant les 3ers mois de tt (après 1 an de tt dans 10% des cas)
- plus fréquent chez les noirs
- déficit acquis en C1 Inh
- gammapathies monoclonales, hémopathies lymphoïdes, maladies auto-immunes (production d’Ac anti-C1Inh, consommation excessive du C1 Inh))
- AE secondaires aux IEC ou aux sartans (10% de réaction croisée)
Critères diagnostiques
- gonflement localisé et soudain des tissus sous-cutanés ou sous-muqueux (oedeme blanc, mou, déformant, circonscrit, indolore) pouvant mettre en jeu le pronostic vital du fait de l’atteinte laryngée
- installation en quelques minutes ou quelques heures
- transitoire (24 à 72h), récidivant, sans séquelle
- pas d’urticaire associe
- prodromes : non prurigineux +/- douloureux (brulure)
- zones de prédilection pour chaque patient
- atteinte ORL : laryngé (dysphagie, modification de la voix, dyspnée)
- atteinte abdominale : crises sub-occlusives (douleurs abdominale, nausées, vomissements) +/- ascite, choc hypovolémique (elles durent 48 à 72h en l’absence de ttt)
- inefficacité du tt corticoïde, antihistaminique et adrénaline
- histoire familiale d’œdeme (forme héréditaire)
- un ttt par IEC ou sartans (forme acquise médicamenteuse)
Diagnostic différentiel
– Quand penser à un AE héréditaire devant un oedeme de Quincke ?
ANGIOEDEME | BRADYKINIQUE | HISTAMINIQUE |
---|---|---|
Description | Blanc, Deformant, circonscrit, Douloureux |
Rouge (urticaire) Etendu Prurigineux |
Durée | >12H à quelques jours | Quelques heures |
Atteinte Digestive | Fréquente | Exceptionnelle |
Contexte | Hérédité (Tr Auto Dom) Acquis Oestrogenes (CO, THS) IEC, AAII |
Allergie, atopie |
Sensibilité aux corticoïdes | nulle | Bonne |
Sensibilité à l’acide tranexamique | Bonne | Nulle |
– Prise en charge d’un angiœdeme de la face
4. Bilan paraclinique
– Aucun examen biologique en urgence ne permet d’affirmer le diagnostic
- l’exploration du complément et le dosage du C1 Inh peuvent être réalisés à distance
- abaissement du C4, dosage du C1 Inh et de son activité fonctionnelle, baisse de l’activité fonctionnelle du C1 Inh sus oestrogènes ou pendant les grossesses, mutation du gène qui code le facteur 12 (seulement dans 15 à 20% des cas d’AEH)
– Si douleur abdominale ou syndrome pseudo-occlusif :
- échographie ou TDM pour diagnostics différentiels (présence d’ascite, d’œdemes muqueux)
5. Prise en charge thérapeutique
– Traitement symptomatique :
- de la dyspnée
- de l’hypovolémie
- de la douleur
- des vomissements
- proscrire tout geste invasif qui peuvent aggraver l’AE
- garder le patient en position assise ou demi assise
– Traitement spécifique :
- formes modérées (membres, extrémités, scrotum)
- acide tranexamique (Exacyl®)
- agent antifibrinolytique
- 1 à 2 g IVL puis per os toutes les 4 à 6 heures pendant 48h
- contre-indications : allaitement, pathologies thrombo-emboliques
- acide tranexamique (Exacyl®)
- en cas d’échec ou de forme grave d’emblée :
- concentré de C1 Inhibiteur (Berinert®, Cynrize® et Ruconest®)
- efficace dans le ttt et la prévention des crises aigues d’OAN
- 500 unités par flacon
- 20U/kg U IVL sur 10 à 15 mn (si poids > 20 Kg) soit en général 2 flacons (500 U si Poids < 20 Kg)
- injection IVL dans la tubulure de la perfusion après reconstitution de la solution avec le solvant fourni (pas de flash)
- efficacité en 30 mn après la fin de l’injection (stabilisation de l’oedeme)
- en cas d’aggravation après 30 mn refaire adrénaline (dans l’hypothèse d’une allergie) et une injection de 500 unités de Bérinert®
- absence de contre indication
- concentré de C1 Inhibiteur (Berinert®, Cynrize® et Ruconest®)
ou
-
- Icatibant (Firazyr®) antagoniste spécifique des récepteurs de la bradykinine
- 1 ampoule de 30 mg (3 ml), voie sous-cutanée lente à renouveler 6 heures après si insuffisant (max 3/24h)
- à utiliser en 1re intention en cas d’AE secondaire aux IEC
- des effets indésirables locaux au point d’injection sont fréquents : une douleur et un érythème peuvent persister de 30 mn à 4h respectivement
- surveillance au moins 12h (risque effet rebond)
- CI chez la femme enceinte et l’enfant
- Icatibant (Firazyr®) antagoniste spécifique des récepteurs de la bradykinine
– Traitement de fond :
- acide tranexamique (Exacyl®) en continu (1 à 3g/j)
- Danazol® : androgène qui stimule la synthèse hépatique du C1 Inh (virilisation, hépatoxicité)
6. Orientation
– Sortie en cas de disparition complète des symptômes chez un patient connu porteur d’un AE héréditaire
– Hospitalisation en médecine pour prise en charge diagnostic (voire orientation vers centre spécialisé)
– Admission en réa en cas d’oedème laryngé ++ ou plus exceptionnellement de collapsus
– Dans tous les cas : arrêt des IEC, des sartans, des oestrogènes qui sont contre indiqués quelque soit le mécanisme de l’AE
7. Annexe
– Centres Nationaux de Reference des Angioedèmes à Kinine (CREAK)
8. Bibliographie
– 2010 International consensus algorithm for the diagnosis, therapy and management of hereditary angioedema. Allergy Asthma Clin Immunol. 2010 ; 6(1) : 24
– www.orphanet-urgences.fr
– Angioedèmes bradykiniques et médecine d’urgence. Chapitre 15 Urgences 2014
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