Epistaxis au SAU

Drs Roger Ranerisson, Guillaume Der Sahakian et Jean-Christophe Allo

 jeudi 27 janvier 2011  |  Janvier 2011  |  0 Commentaires
  SAU Cochin - Hôtel Dieu

 1) Messages importants :

 L’épistaxis peut être grave du fait de son abondance, de sa répétition ou de sa continuité et du risque de décompensation d’une tare associée (coronaropathie, trouble respiratoire…)

 Avis spécialisé en urgence :

  • epistaxis postérieure non contrôlée ou récidivante dans les 72h
  • epistaxis massive
  • epistaxis persistante avec taux hb <8g/dl

 Ecoulement le plus souvent antérieur par les narines mais aussi postérieur par les choanes dont la mise en évidence se fait par l’examen du pharynx à l’abaisse-langue. La vérification répétée de l’absence de saignement pharyngé après rinçage bucco pharyngée est indispensable.

 Le patient peut vomir des caillots de sang (épistaxis postérieure déglutie) et faire évoquer à tort une hématémèse

 Quelle que soit la gravité de l’épistaxis, rechercher :

  • atcd : HTA connue, antécédents hémorragiques, ...
  • prise d’ anti-coagulants et d’antiaggregants
  • durée et abondance de l’épisode hémorragique actuel
  • retentissement de la spoliation sanguine : FC, TA, anxiété, agitation, pâleur, sueurs
  • les facteurs favorisants et les corriger lorsque cela est possible (hypertension artérielle, hémopathie, traitement anticoagulant, ...)

 2) Etiologies

 très souvent, une épistaxis n’a pas de cause évidente : c’est l’épistaxis essentielle en règle bénigne, du sujet jeune

 Facteurs favorisants :

  • HTA
  • Troubles de l’hémostase :
    • ttt anticoagulants (AVK ; aspirine > ains)
    • insuffisance hépatique (alcoolique, virale ou toxique)
    • coagulopathies : thrombopénies sévères, hémophilie, maladie de Willebrand, déficits en divers facteurs de coagulation.

 Causes traumatiques

  • nécessitent de rechercher :
    • fracture des OPN
    • une rhinorrhée cérébrospinale
    • hématome de la cloison qui nécessite prise en charge ORL en urgence du fait du risque infectieux et surtout de nécrose secondaire

 Causes locales :

  • tumeurs malignes des fosses nasales et des sinus (épistaxis UNILATÉRALE répétée avec hypo ou anosmie, une obstruction nasale avec ou sans rhinorrhée unilatérale et des signes visuels)
  • rhinopathies spécifiques ou non, toute atteinte inflammatoire de la muqueuse nasale peut s’accompagner d’épistaxis, ulcère simple de la cloison, rhinite atrophique, maladie de Churg et Strauss, Wegener etc.
  • fibrome nasopharyngien : " polype saignant au moment de la puberté masculine " (tout saignement de nez spontané chez un garçon impose une endoscopie nasale)
  • maladie de Rendu Osler (télangiectasie hémorragique héréditaire) :
    • angiomatose télangiectasique à la fois cutanée, viscérale et muqueuse, associée dans 10 à 25 % des cas à des anévrysmes et des fistules artérioveineuses, en particulier pulmonaires et cérébrales)

 2) Appel téléphonique ou courrier électronique

 Réponse par le sénior.
 Si signes de gravité, conseiller l’appel du 15 pour transport médicalisé.
 Orienter vers urgences les plus proches, au mieux " urgences ORL " Lariboisière.

 3) Tri IAO

 Niveau 1 : signes de gravité hémodynamiques (hypotension, tachycardie, sueurs, marbrures)
 Niveau 2 : les autres cas
 Niveau 3 : épistaxis peu abondant ; épistaxis tari patient âgé
 Niveau 4 : épistaxis tari patient jeune

 4) Prise en charge en Box

 Niveau 1 : DECHOCAGE.
 Niveaux 2, 3 et 4 : BOX D’EXAMEN.

 3) EPISTAXIS GRAVE

 Prise en charge IDE

  • Calmer le patient, installation en position demi assise.
  • Voie veineuse. Sérum salé isotonique (9%).
  • Bilan :
    • Groupe, RH, RAI, NFS, TP, TCA, ionogramme, urée, créatinine, avec bilan hépatique complet en cas de signe d’insuffisance hépatocellulaire.
    • ECG, bilan radio si indiqué (OPN, TDM)
    • antibiothérapie par voie IV dès les prélèvements effectués.
    • Monitorage scope ; PA ; SpO2 ; O2 en fonction de la saturation.
    • Préparer le plateau ORL (pince coudée, abaisse langue,..) et le kit épistaxis (sonde double ballonnet, mèches de tamponnement ant et post, xylocaïne naphtazolinée®, … présent dans la réserve ortho).
    • Culots O négatifs si indiqués en urgence centre de transfusion, poste 12669/12667

 MECHAGE ANTERIEUR :

  • patient : demi assis
  • Mouchage énergique de chaque fosse nasale pour évacuer les caillots
  • anesthésie de contact et vasoconstricteurs locaux : xylocaïne spray et/ou xylocaïne naphazolinée® (rétraction de la muqueuse).
  • introduction à l’aide de la pince coudée d’une mèche d’alginate de calcium :
    • Algostéril® : la pince saisit la mèche à 10 cm de son extrémité (pour éviter sa chute dans le pharynx à travers la choane) et est enfoncée jusqu’à la partie postérieure de la fosse nasale
    • la mèche est bien tassée en accordéon d’arrière en avant jusqu’à la narine
    • contention de l’extrémité antérieure du tamponnement par un ruban adhésif sur l’orifice narinaire
    • antibiothérapie de couverture (amoxicilline 2 g/j) per os est systématique

  EN CAS D’ECHEC DU MECHAGE ANTERIEUR MISE EN PLACE D’UNE SONDE A DOUBLE BALLONET type Bivona :

  • faire essai gonflage lent des ballonnets (eau sterile)
  • lubrifier la sonde avec lubrifiant hydrosoluble
  • la sonde est introduite jusqu’à la garde (biseau dans le rhinopharynx) le ballonnet postérieur est gonflé modérément (4 à 8 ml) et bloqué dans la choane
  • gonfler ensuite le ballonnet antérieur dans le vestibule narinaire (10-25 ml) pour isoler l’ensemble de la fosse nasale
  • Penser à noter le vol injecté dans les ballonnets et l’heure de la pose
  • dégonfler progressivement les ballonnets toutes les 6 heures pour éviter la nécrose de la muqueuse si le patient ne peut être pris en charge immédiatement en ORL
  • antibioprophylaxie pour prévenir sinusite réactionnelle et tt antalgqies indospensables
  • a défaut sonde double ballonnets :
    • Sonde de Foley (sonde urinaire à ballonnet) dont il est indispensable après l’avoir gonflée de la maintenir en traction vers l’avant afin que la choane soit bien obturée sans geste brutal.
    • clampage de la sonde au ras de l’orifice narinaire.
    • doit être associé à un tamponnement antérieur de façon systématique

  CAS REBELLES RECIDIVANTS EN MILIEU SPECIALISE :

  • cautérisation
  • ligature endoscopique ou chirurgicale
  • embolisation en radiologie interventionnelle

 5) Unité d’observation/USR

 En règle pour tous les patients dans l’attente du bilan, une orientation à partir des box peut être envisagée dans certains cas

 6) Orientation

 Réanimation médicale ou chirurgicale :

  • mauvaise tolérance malgré prise en charge initiale

 ORL Lariboisière :

  • tout patient ayant nécessité un méchage avec sonde double ballonnet
  • la chirurgie d’hémostase et l’embolisation seront indiquée pour :
    • toute épistaxis postérieure non contrôlée ou récidivante dans les 72 heures
    • toute épistaxis massive supérieure à 1 litre
    • toute épistaxis persistante avec un taux d’hémoglobine inférieur à 8 g/l

 Sortie :

  • Epistaxis bénigne sans signe de gravité clinique tarie après compression bi-digitale
    • l’ordonnance de sortie comportera des mèches hémostatiques (Coalgan®) +/- pommade hémostatique locale pommade HEC) pour une mise en place par le patient en cas de récidive
  • En cas de méchage antérieur, la sortie se fait sous antibiotique (Amoxicilline® 2g/24h) et avec nécessité de consulter un ORL dans les 48h

 7) Bibliographie

 Epistaxis, M Menard, Urgences Médico chirurgicales de l’Adulte P Carli, B Riou, C Télion 2è éd. p1245.
 Epistaxis et autres urgences hémorragiques ORL, P Herman, Urgences 2003 : 28, 339-350.

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