1) Messages importants :
– La pleurésie est définie par la présence d’une quantité anormale de liquide dans l’espace pleural.
– Les causes cardiovasculaires, néoplasiques et infectieuses représentent une large proportion des causes de pleurésies mais une large variété de pathologies à la fois pulmonaires et extra pulmonaires peuvent être en cause et le médecin urgentiste est confronté à cette grande diversité.
– Les étiologies des pleurésies sont nombreuses et variées regroupant à la fois des pathologies respiratoires et extra respiratoires. Certaines nécessitent des investigations complémentaires en milieu spécialisé et/ou sont difficilement reconnaissables dès les urgences.
– Le rôle du médecin urgentiste est en premier lieu d’apporter les mesures symptomatiques appropriées en cas d’épanchement mal toléré et de reconnaître les étiologies nécessitant un traitement urgent (hémothorax, pleurésie purulente et embolie pulmonaire). Il doit cependant également pouvoir diagnostiquer d’emblée les causes facilement identifiables dès l’accueil du patient et lui assurer une orientation adaptée vers les différents services spécialisés (pneumologie, cardiologie, médecine interne, réanimation, chirurgie thoracique).
– La ponction pleurale très utile à la démarche diagnostique est un geste peu invasif mais non dénué de risque notamment si le patient est âgé, asthénique ou sous anticoagulants. Elle n’est pas toujours indispensable (embolie pulmonaire et insuffisance cardiaque).
2) Sémiologie
– La toux et la douleur sont au premier plan dans les épanchements récents et de faibles abondances
- La toux est de manière caractéristique sèche et quinteuse et typiquement déclenchée par les changements de position
- La localisation de la douleur d’origine pleurale peut varier en fonction de la localisation de l’atteinte pleurale (possibilité de douleur projetée vers l’épaule et l’abdomen
– la dyspnée prédomine dans les épanchements chroniques et plus abondants.
– L’examen physique recherche :
- Les signes classiques d’épanchement liquidien :
- hémithorax immobile lors des mouvements respiratoires,
- matité à la percussion,
- abolition des vibrations vocales
- silence respiratoire auscultatoire
- L’auscultation peut aussi révéler :
- un frottement pleural (bruit du cuir neuf que l’on plie), synchrone avec la respiration et disparaissant à l’apnée
- un " souffle pleurétique " audible au niveau de la limite supérieure de l’épanchement et qui prédomine à l’expiration. secondaire à la condensation du parenchyme pulmonaire par l’épanchement)
3) Imagerie
– Radiographie pulmonaire :
- nécessaire pour confirmer le diagnostic clinique
- le plus souvent : opacité dense, homogène, basithoracique qui efface l’angle costodiaphragmatique se prolongeant vers le haut par une ligne bordante axillaire avec une limite supérieure concave en haut et en dedans.
- En cas d’épanchement peu abondant ou douteux, limité au comblement d’un cul de sac pleural (quantité de liquide < à 200 ml), il peut être utile de mobiliser l’épanchement par la réalisation d’un cliché en décubitus latéral sur le côté atteint
- Les épanchements sous pulmonaires au cours des pleurésies dites " diaphragmatiques " peuvent simuler une surélévation de coupole. Elles se traduisent par une élévation apparente de la coupole homo latérale, l’absence de visualisation des vaisseaux du lobe inférieur derrière le diaphragme et par un aspect plus plat de la coupole. A gauche on note l’augmentation de la distance entre le sommet de la poche à air gastrique et le parenchyme pulmonaire qui n’excède pas 1,5 cm à l’état normal. }
- Les pleurésies scissurales ou inter lobaires (le plus souvent en rapport avec une insuffisance cardiaque) sont à l’origine de piège diagnostique donnant des images pseudo tumorales sur le cliché de face. Le cliché de profil permet cependant de reconnaître une image en fuseau ou en lentille biconvexe assez caractéristique. }
- Les épanchements pleuraux médiastinaux sont plus difficiles à reconnaître. Ils peuvent simuler un élargissement du médiastin ou apparaître comme une opacité triangulaire médiastinale inférieure}
– Scanner thoracique
- utile avant la réalisation du drainage lorsque le diagnostic de pleurésie purulente enkystée fait craindre des difficultés de mise en place du drain pleural. }
- aide à la distinction parfois difficile entre un empyème et un abcès pulmonaire
– l’angioscanner pulmonaire dans la suspicion diagnostique de l’embolie pulmonaire doit être demandé en urgence lorsqu’une origine thromboembolique est suspectée
– Echographie pleurale
- permet de guider la ponction pleurale lorsque la quantité de liquide est faible et/ou que l’épanchement est cloisonné }
4) Tri IAO
– Dépend du retentissement fonctionnel pulmonaire et des signes associés (fièvre, douleur thoracique, hémoptysie, …) et de l’ancienneté de l’épanchement
5) Démarche diagnostique
– Le contexte accompagnant l’apparition de l’épanchement pleural permet le plus souvent d’orienter d’emblée les hypothèses diagnostiques.
- atcdt de néoplasie, d’accidents thromboemboliques, de cardiopathie ou de cirrhose hépatique
- facteurs de risque comme une intoxication tabagique (cancer pulmonaire) et alcoolique (cirrhose, pancréatite) ou une exposition à l’amiante (mésothéliome, asbestose) doivent être systématiquement recherchés.
- présence d’une anasarque, d’adénopathies (lymphomes, cancers solides), signes cliniques d’insuffisance hépato-cellulaire, de pathologies pancréatiques ou de vascularite
- une attention particulière est également portée au traitement du patient en raison notamment des risques d’immunodépression (corticothérapie, chimiothérapie), d’accident hémorragique (traitement anticoagulant) et d’une possible cause iatrogénique (pleurésies médicamenteuses, pleurésies radiques).
- douleurs thoraciques, dyspnée, contexte de fièvre et de frissons d’apparition brutale évoquent d’emblée une origine infectieuse bactérienne
- douleurs thoraciques, dyspnée, fébricule, hémoptysie, signe de phlébite orientent à l’évidence vers un processus thromboembolique.
- une dyspnée d’installation progressive et une altération marquée de l’état général oriente le diagnostic vers une origine néoplasique ou vers une tuberculose en cas de fièvre, de sueurs nocturnes chez un patient ayant une notion de contage.
- un contexte traumatique oriente d’emblée vers un hémothorax
- l’analyse de la radiographie thoracique associée au contexte clinique, constitue également une aide précieuse à l’orientation diagnostique
– La ponction et l’analyse du liquide pleural intervient au terme de cette démarche
6) Ponction pleurale et analyse du liquide pleural
Voir aussi CODU ponction pleurale
– Les caractéristiques du liquide pleural et en particulier l’aspect macrscopique et le caractère transsudatif ou exsudatif de l’épanchement permettent de séparer les différentes hypothèses diagnostiques
– La ponction pleurale peut être évitée aux urgences dans certaines circonstances :
- elle est inutile dans le cas d’une embolie pulmonaire confirmée.
- son indication doit être pesée dans le cas d’une insuffisance respiratoire sévère. Elle est bénéfique si l’épanchement est la cause de la décompensation respiratoire mais risque de décompenser un état respiratoire précaire (anomalies pulmonaires associées) du fait du risque de pneumothorax.
- elle peut enfin être évitée d’emblée dans certains cas si une orientation diagnostique précise est obtenue au terme de la démarche étiologique. Un tableau d’insuffisance cardiaque patente et dans une moindre mesure, compte tenu des complications possibles sur ces terrains, un tableau de décompensation œdemato-ascitique d’une cirrhose hépatique ou de syndrome néphrotique permet d’attendre l’efficacité du traitement médical (traitement diurétique) et le résultat des autres examens diagnostiques.
- la mise en évidence d’un épanchement de faible abondance et bien toléré dans un contexte de traumatisme thoracique est très en faveur d’un hémothorax
7) Proposition de conduite diagnostique
8) Bibliographie
– Sahn SA. State of the art. The pleura. Am Rev Respir Dis. 1988 Jul ; 138(1):184-234.
– Videos in Clinical Medicine : Thoracentesis. Thomsen T.W., DeLaPena J., Setnik G.S. October 12, 2006 N Engl J Med 2006.
– Light RW, Macgregor MI, Luchsinger PC, Ball WC Jr. Pleural effusions : the diagnostic separation of transudates and exudates. Ann Intern Med. 1972 Oct ; 77(4):507-13
– Hamm H, Light RW. Parapneumonic effusion and empyema. Eur Respir J. 1997 May ; 10(5):1150-6. Review.
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